« Monsieur et Madame Taylor-Brown ? Je suis ravi de vous voir. Entrez, asseyez vous. Allons, ce n'est pas parce que votre fils m'a joué bon nombre de mauvais tours que je vais me montrer déplaisant. D'ailleurs mon éducation me pousserait plutôt à tendre l'autre joue devant ce comportement, mais ma patience a quelques limites. En l'occurrence, je suis cardiaque. Passons.
A proprement parler, Robbie n'est pas un mauvais élève. Du point de vue des notes, du moins. Si l'on excepte les devoirs non faits, sa moyenne est assez bonne. Il a déjà rédigé quelques textes à propos de votre famille qui étaient, je dois dire, assez bien tournés. Et au vu de son dernier prototype de catapulte, lequel a servi à lancer des oeufs il y a peu de temps, je pense que l'on peut dire qu'il assimile particulièrement bien les sciences physiques. Ajoutons à cela que le sport vient glorifier sa moyenne. Il a eu divers problèmes de santé lorsqu'il était petit, c'est cela ? On ne dirait pas. Très bon au soccer, vraiment ...
En fait, je pense que c'est son unique chance de réussir à rentrer dans une faculté. Ses notes ne sont pas brillantes, et il va sans dire que son début de casier judiciaire et les appréciations de ses professeurs ne peuvent que l'enfoncer profondément. Je crois qu'il voulait intégrer un département d'informatique ? Encouragez-le dans cette route. Il a bien piraté le système de notes de l'école pour truquer son bulletin. Sans sa légère dyslexie, les commentaires auraient été vraisemblables. »

M. Johnson, professeur d'un établissement privé qui a refusé de garder Robbie Taylor-Brown suite à une regrettable affaire impliquant une tondeuse à gazon.

« Je crois que Robbie ne parvient pas à trouver sa place dans votre famille. Le déménagement ne l'a guère affecté, le problème se situe dans une sphère plus personnelle. Son refus total d'autorité paraît être sa manière de demander de l'aide. Avec sept frères et soeurs, il est difficile de trouver une place. En dépit de cela,il est indéniable qu'il porte une affection particulière à ses frères et soeurs, et à vous-mêmes, sans prendre compte des différences de fratrie. De jolies idées égalitaires qu'il applique à votre famille mais en lesquelles il dit ne pas croire pour le "monde extérieur". Devant les singularités de ses frères et soeurs, Robbie fait abstraction de ses propres talents et se dévalorise parfois. Il craint qu'on lui en demande trop, de par son âge, si bien qu'il fuie autant que possible ce rôle de modèle pour les plus jeunes.
On retrouve cette même incapacité à se trouver une place en société. Robbie m'a expliqué lors de la dernière séance qu'il ne voulait pas mettre en contact sa famille et ses camarades de classe. Lesquels sont d'ailleurs assez paradoxaux : il côtoie les sportifs décérébrés de l'équipe de sport comme les marginaux du club d'informatique. Il faudrait un travail de bien longue haleine pour qu'il parvienne à s'assumer. Je crains qu'il n'en soit pas capable. L'encadrement ne servirait sans doute à rien, votre fils a besoin du soutien de ses proches et de beaucoup de temps. »

G.Gatcher, psychologue scolaire et conseillère d'orientation attendrie en dépit de l'accident qui a causé la mort de son nouveau chinchilla (suite à une pile de livres tombée sur le rongeur)

« Rob ? C'est ... C'est quelqu'un de très particulier. Je pense que tout le monde s'accorde à le dire. Déjà à cause de cette espèce de ... D'équilibre infernal. J'ai été dans sa classe plusieurs années, et je l'ai déjà vu faire des devoirs assez impressionnants, et nos profs l'ont regardé avec une lueur d'admiration. Le souci, c'est qu'il leur en a fait baver. Tout ce qui représente l'autorité ou une attache le rend particulièrement mal. Vous pensez bien qu'en quatre ans, j'ai pu le voir dans à peu près tous les états. Encore qu'il m'ait formellement interdit d'entrer chez lui, y compris quand une de ses soeurs m'a invitée. Avant les contrôles ou les matchs de sport, toujours la même angoisse. Il se boufferait les ongles jusqu'au sang, se prend la tête entre les mains et il est toujours à deux doigts de tout pleurer. Il y a même un jour où il a tout plaqué et est allé se planquer quelque part en attendant que ce soit passé. Alors qu'honnêtement, il est assez malin pour savoir qu'il y aura des conséquences. Même le plus crétin des joueurs de l'équipe du lycée pouvait le voir. Et Dylan n'était pas une lumière. Dans certains cas, Rob fait ce qu'il qualifie lui-même de montagne pour une taupinière.
Je vous ai parlé de ses brefs regains d'intérêt pour des sujets stupides ? Il connaît tout des tardigrades et peut parler un moment des jardins japonais. Ce qui ne sert à rien dans la vie réelle. Mais cela lui attire le respect de ses amis geeks du pôle informatique. Le respect des gens populaires, c'est uniquement parce qu'il fait du sport. Je ne sais pas ce que pense le reste de la population. Il a toujours l"air étrange, surtout depuis Gotcha. Il a tout de suite adhéré au concept, je l'ai rarement vu aussi heureux. Une très grande sensibilité, un petit coup de crayon, une notion particulière du bien et du mal, la possibilité de se procurer tout et n'importe quoi sur le campus grâce à ses "amis", qu'il touche sa bille en sport et qu'il soit considéré comme un jeune à "haut potentiel", quasiment surdoué, c'est tout ce qu'on retient de lui. Avec Gotcha. »

Une ancienne petite-amie présente à Yale

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