QUELQUES SEMAINES AVANT D'ARRIVER À YALE

Deux semaines. Deux semaines que j'essayais de foutre cette beauté dans mon lit. Amanda Brighton. Amanda (PNJ) était étudiante à Yale, nous avions fait connaissance lorsque j’étais venu sur le campus pour faire une sorte d’état des lieux. Evidemment, mon choix s’était arrêté sur Yale depuis bien longtemps, mais bon Havard se disait aussi intéressée par ma candidature alors je voulais être sûr de ne pas faire le mauvais choix. Dès la première minute, le courant était bien passé. Amanda était étudiante en Sciences Politiques, elle put donc me donner des conseils sur cette filière que je comptais suivre. Nous avions passé trois heures entières sur le campus, entre la visite des bâtiments d’études et ceux des résidences universitaires. Elle me présenta aussi quelques gars de fraternité. Amanda était intelligente et je sentais bien qu’elle n’était pas indifférente à mon charme. Je pensais qu’elle était fidèle à la réputation de fille facile que certaines étudiantes entretenaient dans les universités américaines. Malheureusement pour moi, Amanda devait être l’exception à elle règle. En jeune adolescent avec les hormones en rut, j’avais même pensé naïvement que nous ferions notre affaire dans un coin reculé de la BU, entre le rayon d’histoire ancienne et celui de l’art européen du XVIème siècle. Bien sûr, la seule proximité qu’il y eut entre nous, ce fut quand nos doigts se touchèrent lorsqu’elle me tendit une énième brochure vantant les mérites de Yale. Avant de partir, nous échangeâmes nos numéros de téléphone, soit disant si j’avais des questions sur l’université, mais je savais bien qu’elle voulait aller on a date.

Mon père m’avait toujours dit qu’il ne fallait pas rappeler trop vite les jeunes femmes à qui ont avait pris leur numéro de téléphone. Je la contactais alors pendant que j’attendais Chelsea (ma « copine » de l’époque) à la sortie de son cours de danse. « Amanda, c’est Seth Prince.
- Le blond platine d’Alaska, c’est ça ? se souvenait-elle.
- Techniquement, je suis plutôt châtain clair. » Je ne supportais pas qu’on me fasse une remarque sur la couleur de mes cheveux qui avait été la source de moquerie dans mon enfance, ayant à l’époque une tignasse d’un blond si clair qu’on aurait franchement pu pensé que j’avais même pris un sérieux coup de vieux et que j’étais à la retraite. « Dis moi, je me souviens que tu m’avais dit que tu avais toujours eu envie de visiter l’Alaska et j’ai pensé que ça pourrait être cool si tu pouvais venir passer quelques jours avec mes potes et moi dans le chalet de mes parents. On sera genre une dizaine. » Voilà comment je lui balançais ma fortune à la gueule, lui proposant bien sûr de prendre en charge son billet d’avion. Elle ne refusa pas.

Les premiers jours se passèrent merveilleusement biens, sans pour autant que je parvienne à la mettre dans mes draps. Le coup de maître vint lorsque nous décidâmes mes potes et moi d’aller en ville pour profiter d’un cirque de passage. C’était pittoresque et franchement typique de la région, voilà pourquoi bien sûr Amanda adora l’idée.
Et c’est ainsi que je me retrouvais donc dans cette roulotte, assis à côté d’Amanda toute excitée à l’idée d’écouter la diseuse de bonne aventure en face de nous me prédire mon avenir. Elle pouvait, d’après elle, tout voir par vision, rien qu’en touchant les mains. Bien sûr, elle se mit à avoir des spasmes en saisissant les mêmes. Cela m’amusa, mais Amanda semblait franchement croire en ces conneries voilà pourquoi je voyais là-dedans ma dernière chance d’enfin pouvoir passer une nuit torride en sa compagnie.

« Hm… Yé vois… Yé vois qué vous habitez toujours chez vos parents.
- Pas pour longtemps, j’entre à Yale l’année prochaine.
- Et yé vois qué vous avez beaucoup voyagé.
- C’est exact… » Elle avait surement deviné ça en voyant les bracelets africains et ethniques qui ornaient mes poignés. Je venais de passer une année entière en Afrique, une sorte d’année humanitaire ou j’avais aidé à la mise en place d’un circuit d’eau pour l’agriculture et l’provisoirement de cette denrée rare dans ce milieu aride. C’était pour cette raison que je rentrais à Yale à la rentrée prochaine avec une année de retard.
« Vous avez des frères zé sœurs. » J’acquiesçais d’un geste de la tête. En même temps, là encore ce n’était pas difficile. Les ménages d’Alaska ne faisaient jamais qu’un seul enfant par foyer. C’était une caractéristique démographique que tout le monde connaissait dans la région. « Continuez ! » la supplia presque Amanda. De toute évidence, elle prenait ce petit jeu très à cœur. « Yé vois qué vous êtes un jéne homme très intelligent. Vous vous intéressez bécoup à l’actualité.
- Vous êtes incroyable ! s’exclama Amanda en se dandinant sur sa chaise. C’est un étudiant en Sciences Politiques !
- Justement, yé vois une grande carrière. Vous serez surement assistant dé un homme politique important dé Washington ! » Je restais silencieux, soupirant en moi-même. Tous les étudiants de Yale qui sortait avec un diplôme en sciences politiques passaient par la case du stage aux côtés d’un politicien. Il ne fallait pas être une lumière pour le savoir. Elle poursuivit pendant plusieurs minutes, me promettant une grande carrière. Si je la laissais poursuivre, je sentais bien qu’elle allait bientôt m’assurer que j’allais devenir sénateur et peut-être même Président des Etats-Unis, voilà pourquoi je changeais le sujet pour lui demander de me prédire mon avenir sentimental et amoureux. « Yé vois une blonde.
- Ah ça, c’est surement toi Amanda ! dis-je en souriant.
- Non, non c’est quelqu’un d’autre » m’assura la diseuse de bonne aventure. Et vlan ! Merci d’avoir cassé mon coup, vieille peau. « C’est une jeuné fille qué fait des études d’arts ». Je l’écoutais doucement. Bien sûr, je faisais mon possible pour ne pas prendre au sérieux ses prédictions, mais que voulez-vous, une part de nous souhaite toujours croire en ce genre de chose.

Cette conversation se poursuivit encore un peu. Commençant à perdre patience, je décidais de me lever pour quitter cette roulotte. C’est alors que la diseuse de bonne aventure refusa de relâcher de mes mains, assurant qu’elle n’avait pas terminé. « Attendez ! Yé vois aussi un tableau ! Un très beau tableau !
- Hein ?
- Et des barreaux, comme dans une prison.
- Ok madame Irma, la séance de spiritisme est terminée ! dis-je en dégageant mes mains dans d’un geste brusque. Pour être tout à fait sincère, je ne savais pas comment elle était au courant de tout ça, mais il était clair que je n’avais aucun avantage à en tirer si je la laissais continuer. Mes sœurs et moi avions fait un pacte, cette histoire était un secret, et personne ne devait être au courant.

A la fin du mois, je fis mes premiers pas à Yale, espérant que toute cette histoire serait maintenant définitivement dernière moi.

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